
Lettre à toi qui ne crois pas mériter d’écrire
Il y a des jours où on se demande ce qu’on fout là.
Devant une page blanche, avec cette sensation de fraude collée à la peau comme une moisissure silencieuse.
On se dit que les autres sont meilleurs, plus clairs, plus doués. Qu’on n’a rien d’un écrivain, rien d’important à dire.
Alors cette semaine, j’écris à celui ou celle qui doute. Qui n’ose pas. Qui croit ne pas mériter.
À toi qui écris dans l’ombre,
Peut-être que tu penses que c’est un jeu d’adultes, cette affaire de romans.
Que les vrais écrivains ont des diplômes, des rituels, des étagères pleines de chefs-d’œuvre annotés.
Peut-être que tu te dis que tu n’as pas assez vécu, ou trop mal, ou trop tordu.
Tu crois que tu dois être légitime.
Moi je te dis : non.
Tu dois être vivant. C’est tout.
Et tu l’es, non ? Avec tes cicatrices, tes colères, tes rêves de travers.
Avec cette voix intérieure qui te murmure des histoires, même quand tu fais semblant de ne pas écouter.
Tu es de ceux qui regardent les choses autrement.
De ceux qui sentent ce qui dérange.
De ceux qui saignent plus doucement, mais plus profondément.
Et cette sensibilité-là… c’est une porte.
Elle ne s’ouvre pas toujours facilement. Elle grince. Elle claque parfois.
Mais derrière, il y a un monde que toi seul peux écrire.
Écris-le mal, écris-le faux, écris-le tremblant. On s’en fout.
Ce qui compte, c’est que tu le fasses. Que tu oses. Que tu arrêtes d’attendre qu’un autre vienne te dire : “Tu as le droit.”
Je suis cet autre, aujourd’hui.
Tu as le droit.
Tu as le devoir, même.
Parce que ton silence, lui, ne sauvera personne.
Mais tes mots…
Tes mots, eux, peuvent tout changer.
Sam Zaenker
Photo de ARTHUR YAO sur Unsplash

